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C'est le pays le plus durement touché par les droits de douane de Trump: l'Inde espère faire baisser la "douloureuse" (ou se rabattre sur l'Europe pour exporter)

Donald Trump en conférence de presse avec le Premier ministre indien Narendra Modi, à la Maison Blanche, le 13 février 2025.

Donald Trump en conférence de presse avec le Premier ministre indien Narendra Modi, à la Maison Blanche, le 13 février 2025. - Andrew Harnik / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

De nouvelles négociations s’ouvrent aujourd’hui à New Delhi entre l’Inde et les États-Unis, au sujet des droits de douane de 50% imposés par Donald Trump. Les autorités indiennes espèrent parvenir à un accord plus favorable.

Pour l’Inde, l’enjeu est majeur. Washington a accepté, après plusieurs mois de tensions et de surenchère, de s’asseoir autour de la table pour examiner la possibilité d’un assouplissement des droits de douane. Sur ces 50% de droits de douane, la moitié ont été qualifiés de "punitifs" par la Maison Blanche, car New Delhi continue d’acheter du pétrole russe, ce qui est vu par les Américains comme un soutien indirect à la guerre en Ukraine.

Ces dernières semaines, le ton semble plus conciliant à Washington. Le président américain s’est montré plus ouvert, déclarant vouloir rapidement rencontrer le Premier ministre Modi:

"Je suis convaincu qu’il n’y aura aucune difficulté à parvenir à une issue positive pour nos deux grands pays", a écrit Donald Trump sur son réseau social Truth Social.

Impssible de savoir si cette ouverture reflète une inquiétude vis-à-vis du rapprochement entre l’Inde et la Chine ou une volonté affirmée de renforcer une alliance clé dans la région indo-pacifique, mais le résultat est bel et bien là: les Américains rouvrent la porte à de nouvelles négociations.

Pour l'Inde, il est urgent de renégocier les droits de douane, car l'impact des taxes américaines sur les exportations se fait déjà sentir. Officiellement entrés en vigueur le 27 août, les nouveaux droits de douane ont pesé par anticipations sur les exportations indiennes de biens vers les États-Unis: elles sont passées de 8,01 milliards de dollars en juillet à 6,86 milliards en août, soit une baisse de près de 15%.

Un accord urgent avec l'UE

Cette chute contribue largement au ralentissement global du commerce extérieur indien. Et le pire pourrait être à venir: les véritables effets des nouveaux droits de douane sur les importations américaines se feront ressentir le mois prochain. Washington est en effet le premier client de l’Inde, avec près de 87 milliards de dollars d’achats en 2024.

Face aux incertitudes de la relation bilatérale avec Washington, New Delhi accélère ses discussions avec l’Union européenne. Objectif: conclure d’ici la fin de l’année un accord commercial présenté par Bruxelles comme une "priorité stratégique".

Si ces négociations, engagées depuis plus de vingt ans, s'accèlerent maintenant, c'est aussi à cause de l'incertitude commerciale que fait planer la stratégie de Donald Trump.

Mais entre les Européens et les Indiens, plusieurs points de friction subsistent: le protectionnisme indien en matière agricole tout d'abord, car l'Inde veut à tout prix assurer la sécurité alimentaire pour sa population de 1,4 milliard d’habitants. La taxe carbone européenne ensuite, qui devrait peser fortement sur de nombreux produits indiens et que New Delhi considère comme injuste.

Le principal désaccord reste cependant celui sur un dossier hautement symbolique: le riz. L’Inde exige que seule sa production puisse porter l’étiquette "basmati" en Europe. Une revendication qui heurte directement son voisin et rival pakistanais, actuellement premier fournisseur de riz basmati sur le marché européen.

Pour New Delhi, cette reconnaissance exclusive est devenue une condition essentielle à la signature de l’accord. Bruxelles, de son côté, cherche surtout à éviter la crise diplomatique.

Annalisa Cappellini