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Police-Justice

Des dysfonctionnements de la justice dans l'affaire Estelle Mouzin? La justice va se prononcer ce mercredi

Eric Mouzin, le père d'Estelle, arrive le 14 décembre 2023 au palais de justice de Nanterre

Eric Mouzin, le père d'Estelle, arrive le 14 décembre 2023 au palais de justice de Nanterre - JULIEN DE ROSA © 2019 AFP

Plus de vingt ans après la disparition d'Estelle Mouzin à Guermantes (Seine-et-Marne), la justice va dire, ce mercredi 3 septembre, si l'État a commis une faute lourde dans la gestion de ce dossier et s'il doit indemniser, en conséquence, le père de la fillette.

Y a-t-il eu des dysfonctionnements dans le dossier Estelle Mouzin? C'est la question à laquelle va devoir répondre la justice. Ce mercredi 3 septembre, le tribunal judiciaire de Paris doit dire si l'État a commis ou non une faute lourde dans le traitement judiciaire de la disparition de la fillette de 9 ans, à Guermantes (Seine-et-Marne), en 2003.

Éric Mouzin, le père de la petite fille, a assigné l'État en justice pour obtenir une réparation, estimant que des défaillances ont émaillé l'enquête pendant de nombreuses années, avant d'aboutir aux aveux de Michel Fourniret, en 2020.

Lors d'une audience qui s'est déroulée le 11 juin dernier, Éric Mouzin avait donc demandé 350.000 euros de dommages et intérêts de la part de l'État. Décision attendue ce mercredi.

Le corps d'Estelle Mouzin, jamais retrouvé

C'est le 9 janvier 2003 que la petite Estelle Mouzin, 9 ans, s'est volatilisée à Guermantes alors qu'elle rentrait de l'école. Au tout début de l'enquête, la piste menant à Michel Fourniret avait été évoquée mais sans être réellement étudiée. 

Il faut alors attendre 2020 pour que la juge Sabine Khéris parvienne à obtenir les aveux du tueur en série dans cette affaire. Elle succède alors à sept autres magistrats qui, en près de deux décennies, n'avaient pas réussi à avancer sur ce dossier.

Mais lorsque Michel Fourniret reconnaît les faits, il est déjà au crépuscule de sa vie. L'"ogre des Ardennes" est mort en détention avant d'avoir pu être jugé pour ce dossier. C'est donc seule que Monique Olivier qui a été jugée pour "complicité" et condamnée, en décembre 2023 à la réclusion criminelle à perpétuité.

Dénonçant un "amateurisme", Éric Mouzin estime donc que la justice a failli à plusieurs titres. Il dénonce d'une part la succession des juges d'instruction sur le dossier, entraînant de longs retards dans l'enquête, mais aussi que certains témoignages n'aient pas été pris en compte. Surtout, le père de la petite fille déplore que la piste menant à Michel Fourniret ait été délaissée pendant plus de 15 ans.

Les aveux tardifs de celui-ci, ainsi que son état de santé d'alors, puis sa mort, n'ont pas permis aux enquêteurs de retrouver l'endroit où il a enseveli la fillette en 2003. Malgré plusieurs campagnes de fouilles, le corps d'Estelle Mouzin n'a donc jamais été retrouvé.

Une forme de reconnaissance

Lors de l'audience qui s'est tenue en juin, le procureur a reconnu "des manquements du service public de la justice à l'égard de la partie civile", tout en estimant que cela n'avait pas eu de conséquences sur la suite de l'enquête.

"Il y a une faute lourde, mais entre cette faute lourde et le fait que Michel Fourniret n'a pas été mis en examen, il n'y a pas de causalité directe", a indiqué le procureur, selon un compte-rendu d'audience fait par l'Agence France Presse.

Ce n'est pas la première fois que l'État est assigné pour "faute lourde" en raison d'un dysfonctionnement de la justice. Bien souvent, les victimes attendent de ce type de procédure une forme de reconnaissance de ce qu'elles ont subi.

En matière de faute lourde, les condamnations les plus courantes interviennent en matière de gestion des scellés et des biens saisis (perte, destruction, préjudice lié à l'immobilisation du bien concerné). En 2024, l'État a été condamné à 20 reprises pour faute lourde en raison d'un dysfonctionnement de la justice dont 14 dossier portant sur la gestion de scellés, nous indique la Chancellerie.

L'affaire Estelle Mouzin a par ailleurs fortement contribué à la création du pôle "cold cases" de Nanterre visant, justement, à éviter de nouveaux errements de ce genre.

Vincent Vantighem